Il y a quelque chose qui m’échappe…
1) 1989 : Le Mur de Berlin tombe, l’URSS se délite, le Pacte de Varsovie (alliance “défensive” du bloc communiste) est dissous (1991) en échange de la promesse de dissoudre également l’OTAN (alliance “défensive” du bloc capitaliste). Promesse jamais tenue…
2) Au contraire, l’OTAN s’étend à 12 pays d’Europe de l’Est (de 1999 à 2009), causant l’inquiétude et l’agacement, fort compréhensibles, du gouvernement russe…
3) 1999 : L’OTAN participe à la guerre au Kosovo, en bombardant la Yougoslavie. Opération menée hors de ses frontières, donc absolument pas “défensive” !
4) Dès 2008, l’Ukraine, qui partage une longue frontière avec la Russie, demande à rejoindre l’OTAN. La Russie s’indigne. Au fil des ans, Poutine monte le ton, menace… puis déclenche la guerre qui nous endeuille et nous indigne depuis bientôt un mois…
Simple prétexte ? Peut-être bien. Mais fallait-il «chatouiller le tigre qui somnole» ?
En tout état de cause, on constate que l’élargissement de l’OTAN n’a nullement servi la paix… bien au contraire !
5) On croirait cette réalité évidente et transparente… Mais non : En réponse à la guerre en Ukraine, voilà que Suède, Finlande et d’autres réfléchissent à rejoindre l’OTAN. Et chez nous en Suisse, militaires et militaristes s’empressent de revendiquer «plus de moyens financiers, plus de blindés, plus d’avions de chasse»… On croit rêver !
Ces jours, je relis «Délivrez Prométhée», de Jérôme Deshusses (1978). Où je trouve cette belle réflexion : «Les grandes espèces disparues sont presque toutes mortes d’un abus de blindage, d’un excès d’armement et d’une pléthore défensive. […] Toute sécurité emprisonne, le risque seul libère.»
Alors, de grâce : gardons la tête froide et le cœur chaud. La tête froide pour analyser cette épouvantable crise avec lucidité et sans parti pris (ce qui, faut-il le préciser, n’excuse en rien l’ignoble attaque russe). Le cœur chaud pour accueillir, le plus dignement, le plus humainement possible, les victimes de cette horreur, Ukrainiens et autres, chassés de chez eux par la guerre. Et n’augmentons pas d’un centime les dépenses votées pour l’armée.
Morges, le 18 mars 2022 / Philippe Beck
Note : Une version réduite de cet article a été publiée en «lettre de lecteur» dans 24Heures du 24 mars,
Poutine se comporte envers le Donbass comme Hitler envers l’Alsace qu’il estimait lui revenir. Il se sert de ce prétexte pour envahir le reste du pays, la France de l’intérieur. Maintenant les gens sont tellement saisis par cette critique qu’ils en oublient de critiquer l’OTAN comme tu le fais. Merci de préciser les choses.